Après le crépuscule

Y a un lézard.

Ça fait bientôt cinq ans qu’on n’a plus aucune nouvelle de la planète mère. Rien, pas même des signaux parasités au Centre de Commande. Cinq ans qu’on est coincés sur cette planète pourrie pleine de lézards mangeurs de chair. Je dis que ça pue mais mon pote Chris est plus optimiste. Si y avait un problème avec la Terre, ça se saurait. Y a vraiment aucune raison que le Commandement nous cache la vérité.

D’ailleurs, est-ce qu’ils nous garderaient en faction dans ce marais puant, à la limite du territoire des lézards, si c’était pas pour défendre les intérêts de notre planète mère ? Défendre ma femme et mes gosses qui sont restés là-bas ?

Quand monte la brume

C’est plus comme avant, Puce. T’aurais dû voir ça, les grands vaisseaux dorés qui sillonnaient l’azur, la terre vivace qui s’enfonçait sous nos bottes pendant que nous chassions ces maudits lézards. Et la neige bleue, t’as déjà vue de la neige bleue, petite ? Non, bien sûr, tu es trop jeune. Il ne reste plus rien de tout ça aujourd’hui. Rien que des centres commerciaux et du béton partout. Pourquoi mettent-ils autant de béton, à ton avis ?

Je secouai ma petite tête frisée, feignant l’ignorance même s’il me l’avait déjà expliqué cent fois.

— Ils ont peur de la terre, Puce. La terre ici, tu vois, elle est vivante. Tu marches dessus et elle te suce l’âme, petit à petit, sans que tu t’en aperçoives. Quand nous avons débarqué ici, les premiers colons, ceux qui étaient arrivés avant nous, avaient perdu l’esprit. On les a retrouvés, courant nus dans les collines, hurlant comme des possédés.

Deux nouvelles d’anticipation provocatrices, explorant le destin précaire de l’Homme aux confins de l’Univers.